A propos des arrestations des dirigeants catalans : « ils appellent cela la démocratie, mais cela n’en n’est pas ! »

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A l’heure où nous publions ce communiqué, du 17 octobre, le premier ministre Rajoy vient de déclencher le processus de suppression de l’autonomie de la Catalogne (samedi 21 octobre en milieu de journée). 

Communiqué du Parti Communiste d’Espagne (marxiste-léniniste)

17 octobre

 Ils l’appellent cela la démocratie, mais cela n’en n’est pas.

Liberté pour les prisonniers politiques

La décision prise par Carmel LAMELA, juge de l’Audience Nationale, d’ordonner l’emprisonnement des Présidents de Omnium Cultural[1] et de ANC[2], Jordi Cuixart et Jordi Sanchez, est un pas de plus, d’une particulière gravité, dans l’affrontement entre l’État monarchique et les institutions catalanes.

Après la déclaration d’indépendance du 10 octobre dernier, suspendue dans le même élan par le Gouvernement catalan, il y a eu un enchaînement ininterrompu de provocations de la part du camp espagnoliste. Le Gouvernement et ses complices exigent une reddition sans condition des institutions de la Catalogne, ce qui est une provocation à l’encontre du peuple catalan, qui réclame, à juste titre, le droit de décider de son destin.

Le Gouvernement et les forces politiques qui l’accompagnent sont pleinement conscients des conséquences politiques de cette décision ; de fait, certains de ses représentants (en particulier les dirigeants de Ciudadanos et le porte-parole du PP catalan) font pression pour aller plus loin, et sollicitent l’application immédiate de l’article 155[3] ou bien l’interdiction de programmes électoraux de contenu indépendantiste.

Tout ceci, dans un État qui conserve encore, pour identifier ses rues, les noms de quelques-uns des plus sauvages criminels du fascisme européen et où des milliers de victimes du terrorisme franquiste sont encore enterrées dans des fosses. Cet État a jeté un immense voile de silence sur les affaires de terrorisme d’État ou de corruption, dont les procès s’éternisent, victimes d’un très scrupuleux formalisme juridique, alors que ce même Etat applique d’une main de fer la loi – sa loi – contre quiconque ose remettre en question « l’ordre constitutionnel ».

La clique au pouvoir veut la déroute sans conditions ni alternative des secteurs radicalisés de la bourgeoisie catalane ; dans cet objectif, elle ferme toutes les portes à une solution négociée. Le coordinateur du PP, Martinez Maillo, envisageait l’emprisonnement des dirigeants nationalistes comme faisant partie de la « normalité institutionnelle ; de même, Rajoy, Rivera et Sanchez[4] insistent encore et encore sur le fait que, pour toute négociation, le Gouvernement de Catalogne doit respecter la « légalité démocratique » et la Constitution de 1978.

La réalité est que ces mêmes représentants politiques de l’oligarchie nationale, qui soumet les classes populaires à une détérioration continue des leurs conditions de vie, ont changé les lois et cette Constitution monarchique de 1978, vieille et limitée, à leur envie, en ignorant l’opinion de la majorité des masses travailleuses. Dans l’Espagne actuelle, ce sont eux qui dictent les lois et fixent les limites de la démocratie.

Non, nous ne nous trouvons pas devant un conflit entre l’État défenseur de la démocratie et une minorité indépendantiste qui l’ignore. Nous sommes en train de vérifier dans les faits que la démocratie dont parlent Rajoy et ses alliés est réellement une dictature de classe, dont les normes sont dictées par une caste politique sur le dos de la majorité.

Quelle meilleure preuve que le fait que la détention et l’emprisonnement des représentants d’Omnium et d’ANC aient été ordonnés par une juge de l’Audience Nationale, une juridiction héritière du Tribunal de l’Ordre Publique franquiste ? Il suffit de dire que la constitution de l’Audience Nationale, le 4 janvier 1977, se réalisait en même temps que la dissolution du TOP, cet instrument répressif du franquisme qui, avec pour seule justification le fait de garantir la « démocratie organique » de l’assassin Franco, et qui a réprimé brutalement des dizaines de milliers de combattants antifranquistes et de démocrates.

Assez de mensonges ! Ce que nous vivons ces jours-ci montre, comme nous ne cessons de l’affirmer, la véritable nature du régime de 1978, qui a toujours répondu de la même façon quand ses normes ont été remises en question ; ses normes imposées par une caste de politiciens profiteurs. Cette caste qui a affronté la mobilisation sociale en approuvant l’article 315[5] du Code Pénal et qui a trainé devant les tribunaux plus de 300 syndicalistes pour avoir exercé le droit de grève ; qui a répondu de la même façon à la juste indignation des citoyens contre les brutales restrictions budgétaires du premier ministre Rajoy, en approuvant la loi bâillon, authentique loi d’exception qui limite le libre exercice des droits démocratiques d’expression, d’information et de manifestation.

« Ils l’appellent ça la démocratie, mais ce n’en n’est pas », criaient pour la première fois des milliers de gorges en février 2003 pour exprimer leur refus de la guerre du Golfe, décidée tout aussi « démocratiquement » par le truand Aznar[6], conjointement avec Blair et Bush. Ce même mot d’ordre a été scandé par des centaines de milliers de gorges dans les vagues de mobilisations contre les restrictions budgétaires du gouvernement Rajoy.

Nous vivons un état d’exception de fait, par lequel la clique au pouvoir prétend faire taire les protestations d’un peuple qui veut participer aux décisions qui le touchent. De ce fait, ce ne sont pas seulement les droits du peuple catalan qui sont en jeu : le Gouvernement et ses complices sont en train de violer les droits démocratiques les plus élémentaires de tous, avec la même habituelle impunité.

Dans ces circonstances, notre Parti renouvelle son appel à toutes les forces de gauche et démocratiques, à unir dans un même élan la lutte pour la démocratie, pour la chute du régime corrompu et antidémocratique de 1978. Nous exprimons également notre soutien à l’appel de la Junta Estatal Republicana[7] pour lancer une campagne unitaire qui permettra d’ouvrir la voie vers la République Fédérale. Et nous appelons à faire du 6 décembre prochain un appel général qui servira d’expression et de catalyseur à l’exigence de rupture avec le régime monarchique.

 

Liberté pour Jordi Cuixart et Jordi Sànchez !

Assez de mensonges ! Ils l’appellent démocratie mais ça n’en est pas !

Madrid, le 17 octobre 2017

Parti Communiste d’Espagne (marxiste-léniniste)

Le Comité Éxécutif

 

 

[1] Omnium cultural. Association qui promeut la langue te la culture catalane.

[2] Assemblée Nationale Catalane. Organisation créée en2012, et qui a pour but l’indépendance politique de la Catalogne. Elle a eu un rôle prépondérant dans l’organisation des manifestations indépendantistes et contre la répression depuis le jour du vote pour l’indépendance.

[3] L’article 155 prévoit la possibilité pour le Gouvernement espagnol de prendre toutes les mesures nécessaires pour « obliger une Communauté autonome à respecter ses obligations constitutionnelles ». Le Premier ministre pourrait prendre le contrôle de la région concernée, c’est-à-dire de ses organes politiques et administratifs. Il pourrait alors suspendre et remplacer des membres du gouvernement, prendre le contrôle de la police locale, qui passerait alors sous les ordres du ministère de l’Intérieur, fermer le parlement régional, ou encore prendre à sa charge les services publics locaux.

 

[4] Dans l’ordre des noms cités : le Premier ministre et dirigeant du PP, le Président de Ciudadanos et le Secrétaire général du PSOE.

[5] L’article 315-3 du Code pénal est une survivance du code pénal franquiste. Il dit viser « ceux qui, agissant en groupe ou individuellement, mais en accord avec d’autres, contraindront d’autres personnes à initier ou à continuer une grève ». Il s’agit en réalité d’une mesure qui peut permettre de poursuivre tout gréviste ou syndicaliste qui appelle à la grève.

[6] Ancien président du PP et premier ministre de 1996 à 2004.

[7] Assemblée Nationale Républicaine. Composée et soutenue de nombreux partis de gauche et républicains, dont le PCEml.