Loi «d’urgence sanitaire» Aides massives aux entreprises et «dérogations» conséquentes au code du travail

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« On est en guerre ». Macron l’a dit est redit.  Et comme dans toute guerre, il y a « l’effort de guerre » (des milliards qui coulent à flot pour « sauver l’économie »), les « troupes » envoyées au front et les lois spéciales de l’état de guerre.

Examinée dans le cadre « d’une procédure accélérée », la « loi d’urgence » pour faire face à l’épidémie de covid -19  a été adoptée samedi 21 mars. Elle autorise le Gouvernement « à prendre par ordonnance sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, des mesures relevant du domaine de la loi » : aide massives aux entreprises, modifications graves du droit du travail et restrictions considérables et graves des droits démocratiques.

Cette loi d’exception autour de laquelle le Gouvernement attend une « union sacrée » n’est pas seulement une déclaration de guerre au virus. Elle commence à mettre en place toutes les dispositions qui serviront à faire payer à la classe ouvriere et aux travailleurs la crise de grande ampleur dans laquelle est en train de plonger brutalement tout le système capitaliste-impérialiste.

Il n’est pas anodin, dans ce contexte, que l’armée soit mobilisée non seulement pour mettre en place des hôpitaux de campagne – sans cesse annoncés, mais qui mettent une semaine à se mettre en place, avec un nombre de lits très réduit – ou des transports de malades, mais aussi pour monter en puissance « en appui » et « aux côtés de nos forces de sécurité intérieure », ainsi que l’a déclaré le ministre de l’intérieur.

L’épidémie n’éteint pas la lutte de classes. Elle l’aiguise et nous devons nous préparer à une montée en puissance de la confrontation.

Le 22 mars 2020

Parti Communiste des Ouvriers de France

Les principales dispositions de la loi

Le titre I du projet de loi détaille les dispositions sur le report du deuxième tour des élections municipales et sur l’organisation des conseils municipaux.

Son titre II établit « l’état d’urgence sanitaire » : « La déclaration de l’état d’urgence sanitaire donne au Premier ministre le pouvoir de prendre par décret … les mesures générales limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion et permettant de procéder aux réquisitions de tous biens et services nécessaires afin de mettre fin à la catastrophe sanitaire … Ces mesures peuvent inclure l’interdiction du déplacement de toute personne hors de son domicile dans la zone géographique qu’elles déterminent. »

Il renforce les pouvoirs des représentants locaux de l’Etat et prévoit la punition des contrevenants, avec de très lourdes amendes et des peines de prison.

Le titre III est consacré aux « mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de covid 19 »

La crise sanitaire a précipité une crise économique et financière latente depuis plusieurs mois. Pour ce qui concerne la France, une récession de 1 % du PIB et un déficit public à hauteur de 3,9 % du PIB sont annoncés pour 2020. Dans ce contexte, le projet de loi autorise le gouvernement à prendre « toute mesure » qu’il jugera nécessaire pour « faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du virus covid-19 ».

Le premier volet est un « plan de sauvegarde » de l’économie. Tandis que la Banque centrale européenne (BCE) lance un programme d’urgence de 750 milliards d’euros pour éviter une nouvelle crise de la dette dans la zone euro, Bercy a d’ores et déjà annoncé le déblocage de 45 milliards d’aides directes ou indirectes aux entreprises : soutien à leur trésorerie et mise à disposition de fonds dont le financement est partagé avec les régions.  Le paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité « afférents aux locaux professionnels » (on ne parle par ici du logement des particuliers !) pourra être étalé.

Tandis que les salariés qui ne peuvent pas télétravailler sont sommés d’aller au « taf », en contradiction avec les mesures de confinement préconisées pour ralentir la progressif de l’épidémie, toutes les démarches administratives sont allégées « modifiant le droit des procédures collectives et des entreprises en difficulté ».

Alors que les écoles sont fermées pour nécessité de « distanciation sociale », le nombre d’enfants qu’une assistante maternelle agréée est autorisée à garder, pourra être étendu « à titre exceptionnel et temporaire » !

Le second volet touche aux conditions d’exploitation de la force de travail, introduisant de profondes modifications à plusieurs dispositions importantes « en matière de droit du travail, de droit de la sécurité sociale et de droit de la fonction publique ».

Le projet de loi autorisait le gouvernement à modifier par ordonnances « les conditions d’acquisition de congés payés »  permettait « à tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates de prise d’une partie des congés payés, des jours de réduction du temps de travail et des jours de repos affectés sur le compte épargne-temps du salarié » en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d’utilisation prévues par le code du travail, les conventions collectives et le statut de la Fonction publique. Le texte adopté est finalement revenu en partie sur ce point : un accord d’entreprise ou de branche sera nécessaire pour permettre aux employeurs d’imposer à leurs salariés une semaine de congés payés pendant la période de confinement. Mais les entreprises conserveront la possibilité unilatérale d’imposer ou de modifier les dates de RTT ou de jours du compte-épargne temps.

Des dispositions seraient également prises pour « permettre aux entreprises de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation ou à la continuité de la vie économique et sociale de déroger aux règles du code du travail et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical ». On peut, sans grande imagination, s’attendre à ce que ces mesures présentées aujourd’hui comme temporaires soient étendues à tous après l’épidémie, lorsqu’il s’agira de « relancer l’économie » … et les profits !