Sur la fuite du roi Juan Carlos

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Nous publions la traduction du Communiqué du Parti Communiste d’Espagne (marxiste-léniniste) : sur la fuite du Roi « Emérite ».

Les notes sont des notes de traduction.

Dans un bref communiqué daté du 3 août de cette année, le dit Roi Émérite [1] informe son fils Felipe VI de sa décision de déménager hors d’Espagne. Ainsi que l’avait fait son grand-père Alfonse XIII le 14 avril [2], c’est un texte rempli de mensonges, invoquant son amour de l’Espagne et « la conviction de rendre un meilleur service aux Espagnols ». La réalité c’est que ce sinistre personnage quitte le pays à cause des scandales de corruption dévoilés par la justice suisse, dans une frauduleuse manœuvre pour sauver la monarchie, à l’image de ce qui se passa il y six ans quand il n’eut d’autre alternative que d’abdiquer pour sauver le trône de son rejeton.

Juan Carlos fut nommé roi par Franco, un militaire fasciste qui se souleva en juillet 1936 contre le régime républicain légalement constitué et imposa un régime de terreur en Espagne durant 36 ans. Durant la longue dictature fasciste, des centaines de milliers d’hommes et de femmes furent fusillés, torturés, emprisonnés, ou bien ils furent obligés de partir en exil. C’est ce même criminel, Franco, qui décida de nommer son successeur en 1969. Dans une cérémonie solennelle, Juan Carlos, qui était alors prince, jura fidélité à Franco et aux Lois Fondamentales du Movimiento [3]. Après la mort du dictateur, cet individu devint roi, avec l’agrément d’une gauche officielle, qui trahissait alors les aspirations et la lutte du peuple d’Espagne contre le franquisme.

Pendant des décennies Juan Carlos Ier a été le protagoniste de toutes sortes de corruptions économiques. Il fut impliqué dans la tentative de coup d’Etat du 23 février 1981 et il eut des relations « sentimentales » avec de nombreuses maitresses, aux frais du budget de l’État. Tout ceci a été occulté par les moyens de communication corrompus au service du grand capital.

Mais la vérité fait son chemin et aujourd’hui il n’est plus possible de l’enfermer ni de la baillonner. La question n’est pas quel délit a commis l’Émérite mais plutôt quel article du Code Pénal il n’a pas enfreint. Depuis la rébellion face à la loi jusqu’à la fraude fiscale, toute l’échelle délictueuse a été parcourue par l’ancien Chef d’État. Et aujourd’hui, en guise de solution, il quitte l’Espagne et « circulez, il n’y a rien à voir » ! C’est cela que souhaite la droite, mais le plus grave c’est que la « gauche » est également prête à collaborer à cette mascarade, en demandant soit un référendum soit qu’il rende ce qu’il a volé.

Mais il ne s’agit pas de cela. Cela, c’est détourner l’attention du vrai problème. La monarchie est l’obstacle qui s’oppose à la solution des très graves problèmes que traverse notre pays. Ça n’est pas un problème de personnes mais le problème d’un système politique organisé autour de la Constitution de 1978. On entend déjà les voix qui demandent une régénération démocratique, ainsi que de nombreux politiques appelant à l’union de tous les espagnols pour sortir de cette situation. Nous ne pouvons pas permettre cettre farce, ni que soit orchestrée une seconde « transition » [4].

Notre Parti dénonce, année après année, le fait que l’actuelle monarchie est illégale et illégitime de par son origine. Elle représente les intérêts de l’oligarchie et est un obstacle fondamental pour mener à bien les réformes structurelles dont a besoin notre pays. Pendant que d’autres préféraient se taire enregardant ailleurs ou bien parler de réforme constitutionnelle, le PCE(m-l) a toujours déclaré que ce système ne peut pas être réformé. Il a été conçu pour défendre les intérêts économiques d’un bloc de pouvoir avec à sa tête l’oligarchie financière. Cette monarchie est au service d’intérêts économiques qui sont incompatibles avec ceux du peuple espagnol et avec la souveraineté nationale de notre pays. Et dans cette affaire, il y a un point d’une extrême garvité. Les media se sont tus, alors qu’ils connaissaient toutes les aventures du monarques : ses adultères payées avec de l’argent publique, les gains de commissions illégales, les comptes bancaires dans des paradis fiscaux … Ceci les rend complices des multiples délits commis par un monarque qui avait organisé dans la Zarzuela[5] une association de malfaiteurs. Un jour il faudra bien demander des comptes à beaucoup de gens sur ce qui s’est passé.

La seule réponse possible est la rupture républicaine. En finir avec cette monarchie corrompue et proclamer la IIIème République, populaire et fédérative. C’est la seule issue. Toute autre voie sera une nouvelle tromperie, un nouveau mensonge, pour que tout reste pareil. La gauche a devant elle une responsabilité historique immense. L’heure est à forger l’unité populaire sur un programme minimum de réformes structurelles.

Nous disposons en Espagne de suffisamment de ressources humaines et économiques pour que toute la population ait un niveau de vie digne, pour assurer à nos jeunes un futur qui ne les obligerait pas à partir pour un autre pays. Nous sommes en capacité d’assurer un système publique de services sociaux de très haute qualité, ainsi que de garantir les retraites. Tout cela est possible, mais pas dans ce système qui appauvrit nos ressources et nous condamne au travail précaire et à la pauvreté.

Finissons-en avec cette monarchie qui dévalorise notre peuple. Luttons unis contre le fascisme, le capital et la monarchie.

Le 3 août 2020

Comité Exécutif du PCE (m-l)


[1] En espagnol, titre honorifique accordé à un ex-roi ou ex-reine, pour leurs « mérites ».

[2] Le 14 avril 1931

[3] El Movimiento Nacional (Le Mouvement National). C’est la désignation officielle de l’appareil d’État de l’Espagne franquiste entre 1937 et 1977.

[4] Nom donné à la période postfranquiste, dont l’assise est la Constitution de 1978, encore en viguer aujourd’hui.

[5] Nom de la résidence royale.