Vaccination et pass sanitaire
L’éditorial du journal de juillet-août, sorti avant le 14 juillet, titrait « Prendre des forces pour les combats qui viennent ». Ils sont « venus » rapidement !
Macron, qui voulait « tourner la page de la crise sanitaire » pour se consacrer à la poursuite des contre-réformes, a dû revoir ses plans. Il venait d’annoncer, le 12 juillet, une nouvelle série de mesures de restrictions, avec notamment l’obligation de vaccination faite au personnel de santé, aux personnels aidants, en établissements et à domicile, l’extension de l’obligation du pass sanitaire pour accéder à des lieux de culture ou de divertissement, aux bars, restaurants… avec, à chaque fois des dates butoir. Cette annonce sortie des discussions au sein du « conseil de défense » toujours aussi opaque, allait se traduire par un projet de loi expédié en quelques jours aux deux chambres, qui ont apporté quelques modifications à la marge. La droite au Sénat a prétendu avoir empêché l’introduction d’une nouvelle procédure permettant le licenciement des salariés « récalcitrants » à la vaccination, mais les deux ministres – Borne et Pannier Runacher – ont tenu à préciser que les patrons pourront bel et bien licencier, suite au refus d’un salarié de se faire vacciner, même s’il est en CDI. Pour les intérimaires et les salariés en CDD, cela sera encore plus facile.
Le passage devant le conseil d’Etat n’empêchera pas l’adoption de cette loi, même s’il émet des « réserves ».
Chaque samedi, depuis le 17 juillet, des manifestations et des rassemblements ont lieu dans de nombreuses villes, dans lesquelles diverses positions s’exprimaient, allant du refus de principe des vaccins, du déni de la réalité même de l’épidémie, à la contestation de Macron et de sa politique, en passant par l’affirmation de la primauté de la « liberté de chacun » sur tout autre considération. Dans ces expressions disparates, la dénonciation et le refus du pass sanitaire tenaient lieu de dénominateur commun au plus grand nombre et le drapeau tricolore était quasiment le seul à être brandi. Les questions sociales n’avaient pas leur place dans ces mobilisations, alors que les annonces de fermetures d’usines, notamment de fonderies de l’automobile, se poursuivaient. Et que la dénonciation des lois liberticides, de la montée de la réaction, de l’Etat policier, de l’Etat au service des monopoles avait été au cœur de la mobilisation du 12 juin.
Le 19 juillet, notre parti diffusait sa position : « Vaccination, oui ; obligation, non ; contrôle généralisé et systématique de la population, non ». Les camarades qui l’ont fait connaître, qui s’en sont servi pour discuter avec leurs amis, dans les familles, avec leurs collègues de travail, ont pu vérifier qu’elle était la bienvenue, et qu’elle permettait au moins de discuter et dégager des points sur lesquels il était possible d’être d’accord. Ce n’est pas rien, étant donné la confusion et la diversité des points de vue et des approches sur toutes les questions soulevées par l’épidémie elle-même, sur fond de profonde colère et exaspération suscitées par la gestion par les autorités politiques et sanitaires.
Trois arguments font généralement réfléchir :
Le fait que des millions de personnes, vivant dans des pays dominés par les puissances impérialistes, se mobilisent pour exiger des vaccins. Cette inégalité flagrante en matière sanitaire ne peut être acceptée.
Le fait que la vaccination agit pour diminuer les risques des formes graves est difficilement contestable. Les risques graves ne peuvent pas être niés et ce n’est pas le personnel soignant qui doit en subir les conséquences.
La mise en avant de la « liberté individuelle » ne prime pas sur les intérêts collectifs.
Nous avons aussi signé et fait connaître la tribune du 22 juillet, signée par un large éventail de responsables d’organisations syndicales, d’associations, de partis, de personnalités, « refusons le projet de loi sanitaire et les régressions sociales ». L’initiative avait été prise par les organisations qui avaient lancé la manifestation du 12 juin, notamment pour ne pas laisser à la réaction le terrain de la contestation de la loi sur le pass sanitaire. Ce texte est aujourd’hui devenu une pétition ouverte à la signature. Ces deux textes sont sur notre site et sur celui de plusieurs des organisations signataires.
Le 31 juillet, ce sont quelque 200 000 personnes qui ont manifesté dans les différentes villes. Le gouvernement, qui craint un mouvement du type « gilets jaunes », a essayé de minimiser l’impact de ce mouvement, parlant d’un phénomène « ultra-minoritaire » et ultra-radical, en mettant en avant des chiffres de progression du nombre de vaccinations.
Nous n’avons pas appelé à participer aux manifestations du samedi, car il n’est pas possible d’y faire entendre une position progressiste, encore moins d’y combattre les positions réactionnaires qui s’expriment dans la confusion générale.
Nous avons participé à des initiatives prises par des organisations syndicales qui dénoncent l’obligation vaccinale des personnels de santé et les mesures de licenciement contre les salariés « récalcitrants », tout en se défendant d’être des antivax. Ces initiatives vont se poursuivre et nous les soutenons.
Il faut dénoncer l’enrichissement des monopoles pharmaceutiques
Un journal économique vient d’annoncer les résultats de Pfizer pour le dernier trimestre : 18,9 milliards de chiffres d’affaire. Dans la foulée, on apprenait que ce monopole pharmaceutique avait augmenté le prix du vaccin facturé qui est passé de 12 euros, à 15,5 pour passer à 20 euros pour les prochaines livraisons à l’UE. Moderna en fait de même. Macron n’y voit pas de problème. Il se félicite du rachat par Sanofi d’une société spécialisée dans l’ARN messager (pour 3,2 milliards de $), pour essayer de combler le retard dans cette branche, tout en poursuivant le plan de restructuration qui supprime des centaines de postes de travail.
Autrement dit, si tous les monopoles ont fait payer la recherche, puis la fabrication par de l’argent public, via les gouvernements et l’UE, les dirigeants de ces deux monopoles, devenus les fournisseurs quasi exclusifs des produits « ARN » vont pouvoir augmenter davantage encore les dividendes des actionnaires. Inutile de dire qu’ils sont farouchement opposés à toute mesure visant à lever les brevets pour permettre la fabrication de masse de ces produits, y compris au niveau international. C’est une exigence de « santé publique mondiale » qu’il est important de faire monter.
Comme nous l’avons mis en avant dans notre prise de position, ce n’est pas à la Sécu de financer tests, vaccins, masques… car ce sont bien les monopoles profiteurs de la crise sanitaire qui doivent payer.
Le lancement de Tabuka et la réorganisation de Barkhane au Mali
Dans le journal de juillet-août, nous avons publié la déclaration des partis et organisations d’Europe, de la Conférence internationale des partis et organisations marxistes-léninistes (CIPOML). Ce texte peut servir à développer une mobilisation internationale pour faire grandir l’exigence du retrait des troupes françaises et celles des autres pays de l’UE, appuyées par les moyens logistiques de l’Otan, du Mali et du Sahel.
Le lancement de Tabuka « patine » encore, car plusieurs gouvernements de l’UE hésitent à engager des troupes « spéciales ». Macron a informé les chefs d’Etat du G5 Sahel, par visioconférence, que plusieurs bases militaires françaises au Mali allaient être abandonnées (Kidal, Tessalit, Tombouctou), d’ici fin 2021, début 2022. Le redéploiement des forces armées françaises se déplacerait davantage vers le Golfe de Guinée, avec des propositions d’accords bilatéraux avec les Etats de cette zone économiquement importante. Le Nord et le Centre du Mali serait « abandonné » aux troupes de la Minusma et l’état-major opérationnel de Tabuka serait implanté à Niamey, au Niger.
Le nouveau chef d’état-major des armées, le général Burkhard, qui a fait une grande partie de sa carrière dans la légion, dans le régiment parachutiste (2 REP), sera chargé de la mise en œuvre de cette politique qui n’a rien d’un retrait des troupes françaises des néocolonies d’Afrique.
Polynésie – Kanaky : l’impérialisme français en difficulté
Macron a effectué un voyage en Polynésie. Les populations exigent depuis des dizaines d’années la reconnaissance officielle des immenses dégâts matériels et humains provoqués par les essais nucléaires atmosphériques entre 1966 et 1974, à Mururoa et Fangataufa, poursuivis jusqu’en 1986 dans le sous-sol des atolls. Elles exigent des engagements concrets en matière de dédommagement, des études sérieuses et transparentes sur le nombre de victimes – plusieurs milliers –- leur suivi sanitaire et la prise en charge des victimes et de leurs familles. Des manifestations ont eu lieu tout au long du séjour de Macron. Celui-ci a parlé d’une « dette vis-à-vis de la Polynésie française », il a promis l’ouverture des archives « sauf si cela présente un risque pour la dissuasion » !. Mais il a surtout insisté sur le rôle et l’importante de la Polynésie dans cette zone de l’Indopacifique, et sur la « chance » qu’avaient les Polynésiens d’être « protégés par la France », face à la Chine.
C’est un message colonial, avec une tonalité menaçante, lancé aux forces qui militent pour l’indépendance de la Polynésie.
Même si les situations sont différentes, Macron avait forcément en tête la question de la Kanaky et l’échéance qu’il a imposée pour le troisième référendum en décembre 2020. Un événement politique vient de s’y produire : non seulement Louis Mapou, de l’UNI a été élu à la tête du gouvernement de Nouvelle-Calédonie début juillet, mais c’est Roch Wamytan – FLNKS – UC – qui a été largement réélu à la tête du Congrès, le 28 juillet, face à une droite profondément divisée.
La campagne pour le « oui à l’indépendance » est lancée.
Parmi les événements et les développements qui ont eu lieu en juillet, il y a le coup de force du président tunisien qui accapare les pouvoirs entre ses mains et s’en prend aux partis politiques, en surfant sur le rejet du parti Ennahdha. Nous avons mis la position du Parti des Travailleurs sur le site. Il y a eu les manifestations à Cuba : l’analyse de la CIPOML est également sur notre site.
Au Pérou, la droite réactionnaire n’est pas parvenue à empêcher la victoire de Pedro Castillo, qui a pris ses fonctions de président le 28 juillet. Il a été élu avec une avance de plus de 40 000 voix sur la candidate K.Fujimori qui a multiplié les provocations et les procédures pour contester cette victoire. P. Castillo, un instituteur d’origine indienne, a été soutenu par un large front d’organisations syndicales et sociales, qui ont « imposé » sa victoire, contre la bourgeoisie et la réaction qui n’ont que mépris raciste pour la population pauvre, en particulier les peuples indigènes. Castillo va être confronté à l’opposition des couches dominantes et de l’impérialisme, et il devra gouverner sans majorité au parlement. Les attentes sont immenses, dans un pays ravagé par la crise sanitaire. La mobilisation des secteurs populaires est indispensable pour créer le rapport de force pour imposer la satisfaction des besoins sociaux et politiques des travailleurs et des peuples du Pérou. Un des enjeux sera la convocation d’une Constituante pour modifier la constitution réactionnaire de Fujimori père.
La situation sur le Continent et dans la Caraïbe a été analysée lors de la 25e session du Séminaire international « problèmes de la révolution en Amérique latine » qui s’est tenu fin juillet à Quito, à l’initiative du parti frère (le Parti Communiste Marxiste-léniniste d’Equateur) et de son organisation de jeunesse. Le PCMLE a fêté son 57e anniversaire le 31 juillet. Quelque 40 organisations ont participé à ce séminaire qui s’est déroulé en visioconférence, autour du thème « la lutte sociale et le rôle de la gauche en Amérique latine ». La déclaration finale est sur notre site.
Notre prochain journal, qui paraîtra le 7 septembre, reviendra sur ces questions et sur les enjeux de la « rentrée » qui est déjà placée sous le signe de plusieurs rendez-vous de mobilisation et de luttes.