Le 13 juillet, à partir de 11h, c’était le troisième « jeudi de la colère ». Les ouvriers de l’usine Semperit commençaient à se rassembler devant l’usine, la route était à nouveau bloquée des deux côtés, avec les immenses rouleaux de bandes transporteuses et les « soutiens » arrivaient par petits groupes. On sentait que quelque chose s’était passé et les élus étaient visiblement plus détendus. Le délégué syndical CGT, Hassan a pris rapidement la parole, pour dire qu’il y avait encore quelques détails à régler, avant que les premiers résultats ne soient donnés au micro. Des groupes de discussion se forment : on commente les derniers débats au parlement sur les ordonnances, avec notamment les facilités données aux entreprises étrangères installées en France pour licencier, ou les annonces de PSE qui se multiplient.
En attendant l’annonce des résultats de l’intense mobilisation de ces derniers jours, des élus lisent les déclarations du CHSCT et du CE. Elles détaillent les nombreux manquements de la direction dans la procédure qu’elle a engagée le 30 juin : « ça parle » aux syndicalistes présents. La direction a cru pouvoir faire passer son plan de fermeture en force, sans tenir compte des règles en vigueur, mais elle s’est heurtée à la résistance des militants syndicaux, des élus qui ont alerté les ouvriers et les ont mobilisés pour dire « non aux licenciements boursiers ».
P. Doucet, l’ancien maire PS d’Argenteuil, prend rapidement la parole pour assurer les ouvriers et les syndicats du soutien de l’opposition municipale. Dont acte. Les autres forces politiques présentes (FI, LO, PCF, PCOF) avaient pris la parole le jeudi précédent.
Quand le DS CGT, Hassan et les autres élus se présentent devant la porte de l’usine, encadrée par deux immenses drapeaux rouges, tout le monde se met en cercle. Hassan prend le micro et commence à remercier les soutiens présents et annonce qu’une délégation d’ouvriers et d’élus de Semperit participe, au même moment, au rassemblement organisé par l’UD CGT 95, devant la préfecture. Le syndicat CGT de l’usine a toujours fonctionné comme cela : on est solidaire des travailleurs qui se battent et on appelle à la solidarité avec le combat d’aujourd’hui, « contre les licenciements boursiers ».
Il poursuit en faisant le point, méthodiquement, sur les événements et les initiatives de ces derniers jours : rencontre à la DIRECCTE et à l’inspection du travail, puis au ministère du travail, la réunion avec des experts, les réunions du CHSCT et du CE… le document de dix pages rédigé par l’avocat, M°Hamida, listant les irrégularités et les manquements de la direction, sans oublier l’AG des salariés, pour les informer des avancées et des blocages, et leur permettre de poser les questions qui les taraudent. Des heures de travail, entre élus, l’avocat, les experts… qui ont abouti à une première victoire :
« On a obtenu une première victoire sur le calendrier parce qu’on a signé un accord qui décale la fin de la procédure au 13 octobre et on est libre de contester tout ce qu’on veut. Le courrier de la DIRECCTE est tombé ce matin ! Elle est d’accord avec toutes les remarques. On commence à récolter les fruits de notre travail, de votre travail : la peur a changé de camp ! Mais attention, ce n’est pas fini ! On va partir en congés mais la lutte continue. C’est à la rentrée que le vrai combat va commencer ! »
Des paroles fortes, prononcées avec calme et détermination, accueillies par les applaudissements des ouvriers et des soutiens.
L’avocat M° Hamida prendra à son tour la parole, pour remercier les ouvriers, les élus de la confiance qu’ils lui ont témoignée. Cet « enfant d’Argenteuil », qui revendique son appartenance à cette ville, ajoutera : « on va montrer que la peau des ouvriers de cette usine vaut chère ».
C’est avec un puissant « on ne lâchera rien » que va se terminer ce « jeudi de la colère », un jeudi qui marque une étape dans cette bataille engagé depuis le 30 juin. Comme chaque année, l’usine va fermer en août. Avant cela, il y a un rassemblement mercredi au tribunal de Pontoise, où le juge doit se prononcer sur l’assignation déposé par l’avocat et le lendemain, ce sera le dernier « jeudi de la colère ».
Ce report dans le calendrier va permettre aux ouvriers et aux salariés de l’usine et ceux du « commerce » dont les locaux sont à Levallois mais qui font toujours encore partie de l’usine, de prendre quelques semaines de repos, pour se préparer à la bataille.
les élus rendent compte des résultats des négociations
Le DS CGT Hassan, durant son intervention. A ses côtés, M° Hamida