L’épidémie ne gomme pas les contradictions de classe

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« Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite, sans condition de revenus, de parcours ou de profession, notre État-providence, ne sont pas des coûts ou des charges, mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe” (…) Il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché ». 

Si nous publions ces paroles de conclusion qu’E Macron a prononcées lors de son intervention du 12 mars, sur les mesures pour faire face à l’épidémie de coronavirus, c’est parce qu’elles sont, dans le fond une remise en cause de la politique menée par tous les gouvernements, dont celui d’E Philippe, qui, au nom de la rentabilité capitaliste, de la nécessité de baisser les budgets sociaux, n’a pas cessé de détruire le service public de santé. Ce sont les combats des personnels de santé et des usagers, qui ont pris de l’ampleur depuis les années Touraine (la ministre de la santé de Hollande) jusqu’aux années Buzyn, (qui a quitté son poste pour participer aux municipales de Paris) et de son successeur, qui ont empêché une plus grande dégradation encore. Ce ne sont évidemment pas ces combats qu’a salués Macron, quand il a exprimé sa « reconnaissance à ces héros en blouse blanche », mais il est clair qu’aujourd’hui, ce combat est plus important que jamais.

Nous n’avons pas la mémoire courte et ce ne sont pas quelques phrases d’un discours qui signifient un changement de fond de politique, encore moins une « rupture », comme il l’a dit, avec le système capitaliste impérialiste. Ce discours qui se voulait solennel, est l’annonce de mesures pour essayer de sortir ce système en crise très profonde, un système mondial qu’une épidémie ébranle. Des accusations grosses de menaces s’échangent entre les dirigeants des grandes puissances, s’accusant mutuellement d’être responsables de cette contamination. Dans le contexte de crise économique, qui peut déboucher d’un moment à l’autre sur une nouvelle crise financière, plus dévastatrice que celle de 2008, ces accusations sont graves. Et les divisions au sein de l’UE et de la « communauté internationale » s’étalent toujours plus, sur fond de fermetures de frontières et de décisions unilatérales. Les appels de Macron à une réponse coordonnée de l’UE relève de l’incantation : l’UE n’est même pas venue en aide à l’Italie, gravement impactée par les conséquences de l’épidémie. Elle mettra des milliards à la disposition des monopoles, comme elle l’a fait en 2008, pour sauver leurs profits et leur système, pas pour aider les travailleurs et les peuples.

Macron a annoncé une série de décisions concrètes et immédiates concernant l’éducation nationale, nos « anciens » et les personnes « fragiles », les « travailleurs et les entreprises », mis sur le même plan.

La fermeture des établissements scolaires, de la crèche à l’université, placent les enfants, élèves et étudiants, ainsi que leurs parents devant de très grandes difficultés. Bien sûr que la solidarité familiale va fonctionner à plein et que l’entraide va s’organiser. Mais les mesures mises en place en matière d’enseignement à distance, vont gravement pénaliser les familles les plus modestes. Prétendre, comme le fait Blanquer, que le bac pourrait se dérouler « quand même » est irresponsable. Après le fiasco des épreuves du « contrôle continu », il faut en tirer les conséquences et arrêter cette réforme majoritairement rejetée. Et il faut arrêter de criminaliser les élèves, les enseignants et les parents qui la combattent.

Les anciens et les personnes fragiles vont être confinés, coupés de la vie sociale, de leurs familles, quand ils en ont. Comme ne cessent de le dire de nombreux soignants, cet isolement est mortifère. Des solutions doivent être mises en place pour garantir à la fois leur sécurité sanitaire et leur bien être.

Pour ce qui est des entreprises, une grande « liberté » leur est accordée par le gouvernement. Le télétravail, qui ne peut concerner qu’un nombre limité de travailleurs, est fortement encouragé, de même que le recours au chômage technique. Il est clair que les garanties de « simplification » données par le gouvernement au patronat, pour organiser le travail, les horaires, pour diminuer les salaires, ainsi que les allègements et même la suppression des prélèvement sociaux et fiscaux pour mars, vont se solder par une précarisation à grande échelle. Comme au moment de la loi El Khomri, des ordonnances Macron et des différentes réformes qui ont liquidé le code du travail, « le même pour tous, partout », le patronat va toujours « plus loin » dans la remise en cause des droits des travailleurs, surtout là où la présence syndicale est réduite.

C’est pourquoi, il faut être aux côtés des travailleurs, des syndicalistes, qui refusent de « faire bloc » avec les patrons et qui défendent les droits et les intérêts des salariés.

Les restrictions au droit de manifester, de se rassembler, se multiplient, au nom des mesures « barrière » à la propagation de l’épidémie. Déjà, plusieurs manifestations ont été annulées en quelques heures. Personne ne nie l’importance de prendre des mesures pour protéger les populations contre le virus et sa propagation. Mais il faut être clair : il faut que les réformes contre lesquelles se battent depuis des mois des millions de salariés, de chômeurs, de précaires, de mal logés, soient au minimum suspendues. Cela ne peut en aucun cas se limiter au report de quelques mois de « la trêve hivernale » ; la réforme de la retraite à points doit être suspendue, de même que celle de l’assurance chômage qui frappe durement les chômeurs et les précaires. Et il est, par exemple, inadmissible que seules les entreprises de spectacle soient aidées et que les intermittents perdent leur emploi et leur statut.

Nous entrons dans une période complexe et dangereuse pour les travailleurs et les masses populaires, qui ne se limitera pas à quelques semaines. Nous entrons dans une période d’approfondissement de la crise générale du système capitaliste impérialiste, dans laquelle l’oligarchie essaie de jouer la carte de l’unité nationale, que Macron appelle l’union sacrée, « qui consiste à suivre tous ensemble un même chemin ».

Nous n’avons pas de « chemin commun » avec l’oligarchie. L’épidémie a mis en lumière les graves conséquences des politiques néolibérales suivies depuis des années. En aucun cas elle ne peut servir d’étouffoir au développement de la contestation ouvrière et populaire contre ce système qui privilégie les intérêts de l’oligarchie, sur le dos des travailleurs et des peuples du monde entier. C’est avec ce système qu’il faut rompre.

Paris, 13 mars 2020

Parti Communiste des Ouvriers de France