Les ouvriers de Foxconn, en Chine se révoltent

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Face à face ouvriers de Foxconn et police

Foxconn est un puissant monopole taïwanais, qui fait fabriquer l’essentiel de ses produits électroniques en Chine. Il est le sous-traitant de presque tous les monopoles étasuniens, européens de l’électronique, de l’informatique, des télécommunications… Ordinateurs, téléphones portables, routeurs… contiennent des produits Foxconn (les box de SFR et de Bouygues aussi) …

Apple fait fabriquer 70% de ses iPhones et 80% du dernier iPhone 14 dans les usines Foxconn en Chine, notamment dans la méga usine de Zhengzhen, dans la province du Henan. L’usine y exploite quelque 200 000 ouvriers, techniciens, recrutés par les autorités locales et par des sociétés privées, bien au-delà des frontières de la région.

La politique du « zéro covid » menée par les autorités chinoises au plan national, a des conséquences dramatiques dans « l’usine à suicides », connue pour ses conditions de travail très difficiles. Quand des cas de Covid y ont été découverts fin octobre, de nombreux ouvriers ont fui l’usine, pour ne pas être enfermés pour continuer à travailler « en circuit fermé ». L’entreprise a mené une active politique de recrutement pour y faire face, d’autant que la production des derniers iPhone 14 devait monter en puissance, à l’approche du « black Friday », grand moment de ventes de produits électroniques. Les dirigeants d’Apple ont multiplié les pressions pour limiter le « manque à gagner » qu’ils ont évalué à 2 millions d’appareils en moins.

A coup de promesses de fortes primes, elle a attiré quelque 100 000 candidats fin novembre.

Mais les primes n’ont pas été versées et les conditions de travail se sont aggravées. Cela a provoqué la colère des ouvriers, enfermés dans l’usine, colère qui s’est manifestée par des rassemblements, des manifestations, relayées par les réseaux sociaux. La répression brutale avec laquelle les autorités chinoises ont voulu briser cette révolte, n’a fait qu’amplifier la colère et des scènes d’affrontements avec des policiers vêtus de combinaisons blanches se sont multipliées.

Cette explosion sociale est venue rappeler un certain nombre de réalités sur le régime qui se prétend « communiste », à la chinoise, et qui réprime les ouvriers qui se battent pour leurs droits. Cette expression de la lutte de classe qui se déroule quelques semaines après le congrès du PCC, montre la violence des rapports capitalistes d’exploitation qui règnent dans les entreprises. Le fait qu’il s’agisse d’un monopole taïwanais dont le chiffre d’affaires « pèse » l’équivalent de 215 milliards de $, que l’essentiel de ses clients sont des monopoles étasuniens, européens… notamment Apple, montrent que la Chine est entièrement intégrée dans le système capitaliste impérialiste mondial.

Nous exprimons notre solidarité de classe avec les ouvriers et les travailleurs de Chine et dénonçons les monopoles donneurs d’ordre qui s’enrichissent sur leur dos, et le régime en place qui les réprime.

Nous publions ci-dessous l’article de La Forge de novembre sur le congrès du PCC.

XXe congrès du Parti communiste chinois

Le congrès du PCC a été marqué par l’affirmation des ambitions d’une puissance impérialiste qui lutte pour l’hégémonie mondiale, en contestant celle des puissances impérialistes emmenées par l’impérialisme étasunien. Le PCC a depuis longtemps abandonné l’idéologie et la politique marxiste-léniniste au profit du développement d’une économie capitaliste impérialiste sous la direction d’un parti qui n’a de communiste que le nom. Sa politique a été longtemps guidée par la volonté d’intégrer les mécanismes économiques néolibéraux, pour gagner des marchés au niveau international et développer une puissante base économique et industrielle, y compris dans les secteurs de pointe. L’impérialisme chinois est devenu un concurrent sérieux des autres puissances impérialistes, notamment de l’impérialisme US qui déploie une politique économique et militaire pour essayer de contrer le développement de la Chine. C’est dans ce contexte que s’est tenu le XXe congrès.

La Chine, un concurrent qui inquiète les puissances impérialistes occidentales

La place qui a été donnée dans les médias, et en particulier dans les grands journaux de la bourgeoisie en France mais aussi dans les grands pays capitalistes impérialistes, montre l’importance que revêt le congrès du parti de cette grande puissance capitaliste impérialiste. Dans le quotidien Le Monde, par exemple, une série de 5 longs articles ont préparé l’événement. Et pendant la tenue et le déroulement du congrès, de multiples analyses, tribunes et commentaires ont été diffusés dans les journaux et les radios. Les spécialistes de la Chine ont été sollicités pour donner leur avis de connaisseurs.

Bref, si au cours de ce mois d’octobre nous avons beaucoup entendu parler de la Chine, les points de vue dominants qui se sont exprimés sont ceux de concurrents impérialistes inquiets de la montée en puissance de ce grand pays qui menace objectivement leurs intérêts ; ils scrutent donc les événements qui s’y produisent avec beaucoup d’attention, à plus forte raison quand il s’agit du congrès du PCC, le parti qui fixe la ligne et donne le ton.

Xi Jing Ping et ses partisans confortent la domination de leur ligne dans tous les domaines

Dans notre journal de décembre 2021, nous avions consacré un long article au 6e plénum du comité central du PCC. Ce plénum, le dernier avant le XXe congrès et qui le préparait, s’était conclu par la résolution suivante :

« Le comité central lance un vibrant appel à tout le parti, à toute l’armée et à tout le peuple chinois multiethnique pour qu’ils s’unissent plus étroitement au comité central du parti rassemblé autour du camarade Xi Jinping ; appliquent intégralement la pensée de Xi Jinping sur le socialisme à la chinoise de la nouvelle ère ; fassent rayonner le noble esprit fondateur du parti. ». Le 20e congrès a été le moment solennel de confirmer cette orientation et de la faire avaliser par l’ensemble du parti.

La vidéo relayée et largement commentée par tous les médias où l’on voit l’ancien président Hu Jintao pris par le bras et conduit fermement vers la sortie est une mise en scène soigneusement orchestrée pour dire à tous, les cadres du parti et tous ceux proches de Hu qui voudraient contester la direction : maintenant c’est moi le patron. Xi a promu au nouveau comité central tous ses fidèles pour remplacer des personnalités jugées trop réformatrices et trop proches de Hu Jintao qui, pendant son mandat, se serait montré particulièrement tolérant à l’égard des différentes factions du parti.

En 2018, Xi avait déjà renforcé son pouvoir en faisant modifier plusieurs articles de la constitution dont celui qui limitait à 2 les mandats de président de la république.

Les quatre nouveaux entrants au Comité permanent sont tous des alliés de Xi Jinping.

Au sein du Bureau politique, les observateurs notent la présence renforcée des ingénieurs ; cela correspond aux priorités fixées par Xi Jinping sur les nouvelles technologies, particulièrement le spatial, l’intelligence artificielle, les semi-conducteurs, le quantique et les biotechnologies.

Bref, ce congrès a renforcé la mainmise de Xi et de ses partisans au sein du parti, éliminant ou réduisant les oppositions en son sein, car le parti est un levier essentiel à la mise en œuvre de ses orientations politiques. En plus du parti, Xi a également accru sa mainmise sur l’armée dont le budget a été multiplié par deux en 10 ans. Il y a combattu la corruption ce qui lui a permis d’écarter plusieurs hauts gradés remplacés par des « faucons », des hommes acquis à sa politique nationaliste agressive.

Mais cette politique qui vise à faire de la Chine la première puissance mondiale, devant les USA a un coût que paie cher la classe ouvrière et les masses populaires chinoises, mais aussi les autres peuples d’Afrique, d’Amérique latine, d’Asie et du Moyen-Orient où la Chine a investi massivement.

Nous conseillons à nos lecteurs de lire en complément de cet article la partie consacrée à la Chine dans le document de notre dernier congrès Pour une rupture révolutionnaire avec le système (pages 24 à 31).

Données sur le congrès du PCC

Le congrès du PCC a lieu tous les 5 ans. A ce dernier congrès qui s’est ouvert le 16 octobre participaient 2296 délégués représentant 96 millions de membres du parti.

Le nouveau CC élu compte 205 membres (dont seulement 11 femmes),  le Bureau politique 25, et les membres permanents sont au nombre de 7. Xi Jing Ping, 69 ans, a été réélu secrétaire général du parti.

Bref rappel historique et chronologique

La RPC (République Populaire de Chine) est proclamée le 1er octobre 1949, à l’issue de la longue lutte de libération nationale dirigée par le PCC et son leader Mao Tsé Toung.

Mao Tsé Toung dirige la Chine de 1949 à sa mort en 1976.

Un traité d’amitié d’alliance et d’assistance mutuelle est signé entre l’URSS et la RPC le 14 février 1950. (Il expirera le 15 février 1963.). Mais les relations sino-soviétiques vont très vite se détériorer avec l’arrivée de Khrouchtchev au pouvoir en URSS ; la rupture est consommée en octobre 61 au XXIIe congrès du PCUS. Les rivalités entre l’URSS et la Chine vont perdurer jusqu’à la chute de l’URSS dans les années 90.

La période Mao Tsé Toung va être marquée par différentes réformes au caractère erratique et aux conséquences parfois dramatiques. Distribution des terres aux paysans pauvres dans les premières années, puis « grand bond en avant » qui instaure la collectivisation et les plans quinquennaux d’industrialisation. Alors que son autorité est menacée par Liu Shaoqi et Deng Xiaoping, Mao lance en 1966 « la révolution culturelle », mobilisant la jeunesse contre les élites.

  • Le 26 octobre 1971 la Chine est admise à l’ONU
  • En février 1972 le président des USA, Richard Nixon, visite la Chine.

Hua Guofen assure la direction du pays à la mort de Mao pendant la période de transition de 1976 à 1978.

Deng Xiaoping prend la direction du pays de 1979 à1989 ; il engage la Chine dans la voie des réformes économiques libérales ; la corruption se développe et les inégalités sociales s’aggravent.

  • Le 1er janvier 1979 la Chine établit des relations diplomatiques avec les USA ; Deng Xiaoping visite le pays. C’est la première sortie d’un dirigeant chinois hors du pays. Elle marque un rapprochement important avec les USA, au nom du « pragmatisme ».
  • En 1989 une partie de la jeunesse voudrait que la libéralisation économique soit accompagnée d’une libéralisation politique : c’est l’occupation de la place Tian’anmen qui sera sévèrement réprimée.

Jiang Zemin est élu secrétaire général du PCC de 1989 à 2002 (3 mandats)

  • En 2001 la Chine adhère à l’OMC (Organisation mondiale du commerce)
  • La même année, création de l’OCS – Organisation de coopération de Shanghaï , qui réunit la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan ; élargie à l’Inde et au Pakistan en 2016 et, depuis 2021, à l’Iran. (La Mongolie, la Biélorussie et l’Afghanistan sont membres observateurs).

Hu Jintao est élu à son tour SG du PCC de 2002 à 2012 (2 mandats) ; lors de son second mandat, il est éclaboussé par des scandales de corruption qui touchent ses proches collaborateurs ; il échoue à faire appliquer ses réformes en vue de réduire les inégalités sociales.

Xi Jingping lui succède en 2012 ; très vite il cumule le titre de SG du PCC, président de la république et dirigeant de la commission militaire du CC.

Dès son accession au pouvoir, il impose au parti une ligne nationaliste agressive ; il désigne l’Occident comme l’ennemi, critiquant ouvertement les réformes libérales de l’ère Deng Xiaoping et mène une lutte contre la corruption qui gangrène l’Etat et le parti. Ses réformes visent à réduire le plus possible la dépendance de la Chine vis-à-vis des puissances occidentales et à réduire les inégalités sociales.

Avec Xi Jinping, on passe assez rapidement de la relation privilégiée avec les USA, au nom de pragmatisme, à un affrontement plus direct. Le basculement s’opère aussi en réponse à l’agressivité croissante, politique, économique, militaire, des USA contre la Chine, désignée comme l’ennemi systémique des USA.