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Des « sous munitions » pour la sale guerre en Ukraine

Le sommet de l’Otan va s’ouvrir à Vilnius (11-12 juillet), en Lituanie. Au centre des débats, la guerre d’Ukraine dans laquelle l’Otan est totalement impliquée. Zelensky et les gouvernements des Etats Baltes, de la Pologne, font pression pour une adhésion la plus rapide possible de l’Ukraine à l’Otan. Macron a dit que la France était favorable à ouvrir un processus dans ce sens, en insistant sur « les garanties de sécurité » qu’il faudrait renforcer pour soutenir l’Ukraine. Biden a réaffirmé la position de l’impérialisme US, à savoir qu’il n’était pas possible d’intégrer maintenant l’Ukraine en guerre, car cela signifierait entrer en guerre ouverte contre la Russie. Cela n’a rien à voir avec une position de « retrait », mais c’est une position qui tient compte des intérêts de l’impérialisme US qui n’est pas prêt à entrer en guerre avec la Russie, d’autant que son « ennemi stratégique » est la Chine.

D’ailleurs, Biden a annoncé une nouvelle livraison d’armements à l’Ukraine, notamment des bombes à sous-munitions.

Les bombes à sous-munitions

Ces armes sont particulièrement dangereuses pour les civils et polluent de vastes superficies pour des années. En effet, ces « sous-munitions » sont des dispositifs explosifs antichar et antipersonnel, dont une partie explose au moment de l’impact et une partie se disperse sans exploser tout de suite. Ce sont donc des dizaines, voire des centaines ou des milliers de mines antipersonnel qui explosent au moindre contact. C’est une arme qui, selon les termes mêmes de la Convention internationale d’Oslo (2008) qui les interdit, « tuent en mutilent des civils, femmes et enfants compris, entravent le développement économiques, entraînent des pertes de moyens de subsistance, empêchent le retour des réfugiés et déplacés à l’intérieur de leur propre pays » … et cela sur de longues périodes, tant que les zones ne sont pas « dépolluées ». 120 Etats ont signé cette convention, mais ni la Russie, ni les USA, la Chine, l’Inde et l’Ukraine ne l’ont signée.

Ces armes étaient demandées par les responsables ukrainiens, qui « promettent » de ne pas les utiliser sur des territoires étrangers, mais n’hésitent pas à mettre en danger des civils ukrainiens.

Un des « arguments » mis en avant par Biden est que les livraisons d’obus à l’Ukraine ne sont pas suffisantes, que ce soient ceux livrés par les USA ou ceux livrés par leurs alliés européens de l’Otan. Or, comme le disent plusieurs analystes occidentaux, la contre-offensive ukrainienne rencontre des difficultés. De ce fait, ces armes, qui sont très « efficaces sur le champ de bataille » peuvent permettre de briser les lignes russes. Le deuxième argument est celui qui consiste à dire que les « Russes en ont déjà utilisés beaucoup ». C’est ce que dit un éditorialiste du Monde, évoquant les frappes russes contre les bâtiments civils qui font des dizaines de morts : « cette stratégie cynique rend presque secondaire le débat sur le caractère indiscriminé des bombes à sous-munitions ». Biden, qui parle toujours de « valeurs », d’éthique et du « combat pour la démocratie » vient lui aussi de « franchir une nouvelle ligne rouge ». L’annonce de la destruction des stocks d’armes chimiques étasuniennes (7 juillet) ne fait qu’en e souligner le cynisme. Ses alliés européens membres de l’Otan, signataires de la convention d’Oslo, se gardent bien de le critiquer : ils sont trop dépendants de l’Otan.

Les chefs d’Etat et de gouvernements de la Corée du Sud, de Japon, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, prochains partenaires de l’Otan

Invités au dernier sommet de l’Otan à Madrid, ils seront accueillis à Vilnius comme « partenaires » de l’Otan. C’est le secrétaire général de l’Alliance, Stoltenberg, qui sera reconduit de ses fonctions, qui a travaillé à ce rapprochement. Il pourra aussi se féliciter de l’adhésion de la Finlande et poursuivra ses efforts pour lever les obstacles mis par Erdogan à l’entrée de la Suède. Dans la panoplie de ses exigences, Erdogan a mis celle de la réouverture de négociations de la Turquie… au sein de l’UE

Nous publions ci dessous deux article de La Forge de juillet août : le premier argumente notre position sur la nécessité d’exiger l’arrêt de la guerre en Ukraine et le second le complète en montrant l’impasse dans laquelle cette guerre place les peuples, à commencer par le peuple ukrainien.

La Forge652, juillet août 2023

Halte à la guerre en Ukraine, cessez-le feu maintenant, arrêt des livraisons d’armes

Ces mots d’ordre gagnent du terrain dans les consciences. Ils posent ces exigences, sans conditions préalables qui ne servent qu’à continuer une guerre « sans fin » dont les victimes sont les peuples.

Il y a des analyses différentes et divergentes sur la nature de cette guerre, sur les responsabilités de son déclenchement, sur les objectifs poursuivis par ceux qui en sont les acteurs directs et indirects. Il ne s’agit pas de les nier, ni de les taire, mais il faut s’efforcer d’analyser la situation actuelle, qui n’est plus celle de février 2022, date de l’invasion russe. Le « retour en arrière » n’est pas possible et la notion même de « victoire » militaire signifie, au mieux, une étape avant une nouvelle guerre de « revanche ».

Cette guerre a déjà provoqué d’immenses dégâts humains et matériels, d’abord en Ukraine. Sa poursuite signifie leur amplification. Les forces qui s’affrontent ont accru leurs capacités de destruction, avec une escalade constante qui peut impliquer l’emploi d’armes de destruction massive, y compris nucléaires.

Cette guerre a précipité la tendance à l’armement accéléré de tous les Etats : les budgets de guerre explosent partout. Parallèlement, les budgets sociaux fondent, aggravant la situation des grandes masses. Il n’est question que de la nécessité de passer à une « économie de guerre » et la propagande militariste cible la jeunesse, avec des projets d’encadrement idéologique via le SNU, voire l’instauration de diverses formes de « services militaires ».

La guerre en Ukraine est devenue une guerre entre la Russie et l’Otan, dirigée par l’impérialisme US, entre la Russie et ses alliés et l’UE, qui mène une politique de sanctions économiques et qui renforce ses liens militaires avec l’Otan. L’extension de cette alliance politico-militaire se poursuit, avec la perspective d’une adhésion toujours plus probable de l’Ukraine.

L’impérialisme français participe à cette guerre de différentes façons :

En fournissant des armes à l’Ukraine, en renforçant la présence militaire française dans les pays limitrophes de l’Ukraine, notamment en Roumanie, en participant aux manœuvres de l’Otan près des frontières de la Russie, en se prononçant pour une intégration de l’Ukraine dans l’Otan. Sans parler de sa participation à la politique de sanctions. Pour toutes ces raisons, il faut exiger l’arrêt des fournitures d’armes françaises à l’Ukraine et la sortie effective de la France de l’Otan, ce qui serait un pas dans la dissolution de cette organisation militaire agressive.

Quand nous disons qu’il faut l’arrêt de la guerre, sans préalable, cela signifie deux choses :

D’une part, que le retrait des troupes russes, l’arrêt de l’extension de l’Otan et l’arrêt du soutien militaire de l’Otan à l’Ukraine, ne peuvent pas être un préalable à l’arrêt immédiat des combats ;

D’autre part, que toutes ces questions doivent faire l’objet de négociations ultérieures, impliquant les belligérants et toutes les forces, institutions, y compris gouvernements… qui agissent dans le sens de l’arrêt de cette guerre.

Pour nous, un point est essentiel : c’est l’engagement des peuples, des forces progressistes, anti-impérialistes, dans un vaste mouvement en faveur de la fin de la guerre, de la paix et la solidarité avec les peuples.

Nous sommes également convaincus que cette démarche va aider les forces en Ukraine et en Russie, et ailleurs, à résister à la politique de guerre menée par les dirigeants de ces pays. Il faut les soutenir !

Ce sont les bases et ces objectifs sur lesquelles notre parti travaille en France, avec toutes les forces qui partagent l’objectif principal de l’arrêt de la guerre en Ukraine.

La Forge652, juillet août 2023

Aucun des deux camps ne peut « gagner » la guerre

La contre-offensive de l’armée ukrainienne a commencé le 4 juin, dans le sud. Elle s’est matérialisée par 6 points d’attaque le long des 1000 km de « front ». Les responsables militaires ukrainiens essaient de maintenir le secret sur les objectifs stratégiques, pour dérouter les forces armées russes retranchées derrière un énorme dispositif de défenses, sur des kilomètres de profondeur. Il semble que le but de cette vaste opération qui n’engagerait que trois des 12 brigades prévues, est de couper les lignes russes pour isoler la Crimée. La désinformation fait rage, dans les deux camps, comme par exemple autour de la responsabilité de la destruction partielle du barrage de Kakhourka sur le Dniepr, qui a provoqué de grandes inondations et de graves conséquences environnementales, agricoles. Cela affecte aussi le système de refroidissement de la centrale nucléaire de Zaporijia, dont les six réacteurs sont à l’arrêt depuis des mois, mais qui doit continuer à être refroidie.

Au bout de deux semaines de combats, les gains territoriaux de l’armée ukrainienne sont très limités. La reconquête de la ville totalement détruite de Bakhmout et celle de Marioupol, figurent dans la liste des priorités. Mais le scénario d’une reconquête-éclair de l’ensemble des territoires contrôlés par la Russie se heurte aux centaines de milliers de mines dispersées le long du front et aux bombardements continus de l’armée russe. Les dirigeants ukrainiens parlent d’une opération qui va durer longtemps. En attendant, ils continuent à réclamer toujours plus d’armes, espérant avoir bientôt des avions plus modernes (les F-16), mais ils ne peuvent pas espérer écraser l’armée russe. De la même façon que Poutine, qui a déjà perdu sur tous les objectifs initiaux avancés pour « justifier » cette guerre, ne peut espérer une extension territoriale des zones occupées, ni un changement de régime à Kiev, pas plus qu’un retrait des forces de l’Otan.

Plusieurs dirigeants des puissances impérialistes engagées derrière les USA, aux côtés du régime ukrainien, sont conscients des limites de l’armée ukrainienne, même s’ils ne le disent pas publiquement. Ils parlent de plus en plus des « garanties de sécurité » qu’ils entendent apporter à l’Ukraine, allant de pair avec la poursuite d’une politique de sanctions vis-à-vis de la Russie, et de manœuvres d’isolement au plan international. Cette garantie est double : l’accélération du processus d’intégration de l’Ukraine dans l’UE, rejointe par la Moldavie, et la mise en route d’un processus d’intégration dans l’Otan. Cette dernière position est défendue de façon opiniâtre par les régimes des Etats de l’Est européen, notamment la Pologne et les pays baltes. Elle était jusqu’à présent écartée par des piliers de l’Otan, comme les USA, l’Allemagne, la France, qui mettaient en avant le fait que l’intégration de l’Ukraine signifierait une entrée en guerre automatique de tous les Etats membres de l’Alliance contre la Russie. Pour contourner cet obstacle, certains, comme Macron, proposent d’afficher publiquement cet objectif (sans le concrétiser immédiatement) pour envoyer un message de fermeté à Poutine, assorti de l’approfondissement des liens politico-militaires entre l’Otan et l’Ukraine, liens déjà très avancés. Il est peu probable que cela se fasse lors du prochain sommet de l’Otan à Vilnius, mi-juillet. Mais ce retournement de la position de Macron est dangereuse : en renforçant l’Otan elle renforce le camp de la guerre.