Le centre de biotechnologie Novartis est situé à Huningue (68) à quelques kilomètres de la Suisse où se trouve le siège de ce géant mondial de laboratoire pharmaceutique. Ce centre est spécialisé dans la production de médicaments biotechnologiques, le segment le plus innovant en biologie cellulaire et moléculaire (productions d’anticorps monoclonaux constitutifs des biomédicaments, intervenant dans la thérapie en dermatologie, maladies respiratoires, immunologie, etc.). Face à la demande mondiale croissante de biomédicaments, Novartis a investi plus de 150 millions dans une deuxième ligne de production en multiproduits qui a été mise en route début 2020. La production est passée de 1 à 2,5 millions de produit finis.
Cette production exige des travailleurs hautement qualifiés soumis à des programmes de formation continuels. Sur le site travaillent 750 salariés en deux unités distinctes, dont celles des biomédicaments, 7 jours sur 7.
« C’est la première grève dans l’entreprise »: elle a duré 3 jours !
Lors des NAO, la direction a proposé 2,4% d’augmentation (en-dessous des 2,8% de l’inflation), une prime de 300 € brut pour tous et 500€ de chèques vacances !
Les revendications des syndicats (CGT, CFDT et FO) portaient sur les conditions de travail, sur le manque de personnel qui a « du boulot par-dessus la tête » et sur les salaires. Si la direction a été obligée d’embaucher du fait de la nouvelle ligne de production, elle a eu recours à de nombreux CDD et il manquerait une bonne cinquantaine de personnes pour faire le compte.
Ce qui a mis le feu aux poudres : la non-reconnaissance des efforts des salariés
Augmentation de la production avec des embauches qui ne correspondent pas au niveau de production, augmentation des cadences, efforts faits pendant la pandémie, les travailleurs en ont eu assez. La goutte d’eau c’était le mépris, la non-reconnaissance de leur travail, de leurs efforts. « Des chèques vacances ! Pour allez manger au Mc Do ? On va dépenser 500 € là-bas ! Nos salaires stagnent, nos efforts ne sont pas rémunérés et Novartis empoche le gros lot. » s’insurge un travailleur.
La colère s’exprime
Mardi matin le 14 décembre, une centaine de salariés en grève s’est regroupée très tôt devant les grilles de l’entreprise. Pendant toute la durée du mouvement, plus de 150 salariés se sont mobilisés dans toute l’entreprise.
Le service de production moléculaire, unité critique de l’entreprise, a aussi réagi. En régime de travail de 5×8, la première équipe a décidé de faire grève, entrainant les autres. Une quarantaine d’ouvriers étaient grévistes sur la cinquantaine du roulement.
Un des travailleurs nous explique : « L’équipe d’avant nous a fait grève. Nous sommes venus en avance au travail et avons discuté pour savoir ce que nous allions faire. C’était important, parce qu’au boulot, nous n’avons pas le temps de discuter. Nous avons décidé la grève. Malheureusement, une des équipes ne voulait pas faire grève et le patron l’a embobinée par des avantages pour aller travailler à notre place. C’est la première grève dans l’entreprise. Nous étions décidés. On n’a rien lâché pendant les trois jours. La direction l’a eu mauvaise et elle nous traite presque comme des terroristes. Même si nous avons dû reprendre le travail, ça nous a donné une petite expérience pour l’avenir. Et on peut se regarder dans la glace sans honte. »
Correspondance